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Corps

CORPS
De Fabienne JACOB
Editions Buchet Chastel

Monika est esthéticienne en Institut.
Ses clientes s’installent dans la cabine de soin. Réclamant les soins les plus novateurs à seule fin d’accéder à la Beauté, à la Jeunesse ; elles sont allongées et détendues, elles parlent comme on parle sur un divan. Monika recueille les paroles mais surtout les confidences que murmurent les corps.
Aucune femme n’est laide… La beauté intérieure… au-delà du corps… l’humain, la vraie vie sans artifice… et la vie de Monika.
L’histoire de ses femmes emmène Monika dans ses propres souvenirs. Son enfance, sa sœur Else  et sa propre découverte de la féminité.

L’écriture est charnelle, sensuelle… subtile. Même si le texte dans son ensemble manque parfois de clarté notamment dû aux interférences des souvenirs de Monika. Il y a du plaisir à cette lecture : aucune évocation sordide. Juste le corps de femmes qui parle plus que jamais les mots ne sauraient dire.

Une vraie découverte de rentrée !!
Le portrait de femmes contemporaines. C’est la lecture subtile des corps de femmes, à travers ces corps, une âme, une histoire.

Il y a urgence à lire ce livre tout en intelligence. C’est l’histoire de femmes infiniment simples, fragiles, et fortes.

Extrait : «  Presque aucune des femmes qui viennent ici n’aime son corps. Les magazines qu’elles lisent à l’entrée sont remplis de corps de femmes qui n’existent pas. Elles veulent avoir le même, elles aussi, un corps qui n’existe pas. Leur corps à elles existe c’est ça le problème. Trop, à leur goût. Il se rappelle à elles tout le temps elles ne peuvent l’oublier une seconde. Il leur sort de partout leur corps, par le ventre, par les cuisses. Elles payent pour oublier qu’elles en ont un. Parfois elles hésitent à le montrer. J’ai froid, je préfère garder mon tee-shirt, elles disent.  C’est pas vrai je le sais, elles veulent pas se montrer, c’est tout. ».



« Les parents, eux, voulaient nous faire croire que la beauté, c’était notre cousine. Ils voulaient nous la donner comme modèle. Dix-huit ans, yeux myosotis, visage diaphane, cheveux cendrés. Voyez, elle est toujours en robe, elle est toujours soignée, ça compte, ça aussi, qu’ils nous disaient. On n’était pas convaincues Else et moi par la cousine, n’en déplaise aux parents, que la beauté ce fût cela des yeux myosotis un visage diaphane et un corps gracile. La voisine nous faisait autrement d’effet. On disait rien aux parents mais notre modèle c’était elle, avec ses bras comme des mottes, sa vallée noire au milieu des seins et ses claquettes clac clac. Plus tard on voulait les mêmes. Clac Clac. C’était pas du côté du myosotis qu’il fallait chercher, pas du côté de l’Ether, mais de la matière, de la chair. Il n’y avait rien à trouver dans le bleu des yeux de la cousine, le bleu était une couleur qui ouvrait sur le vide une couleur sans fond une impasse. Le brun de la voisine fourmillait de substances autrement organiques, terrestres. C’est du brun, de la chair, qu’on était sorties, Else et moi, on était sûres. »